Lauréat Fondation Crédit Coopératif en 2012, l’Orchestre de Chambre de Toulouse poursuit son incroyable résurrection. Renaud Gruss, administrateur général, nous raconte une histoire passionnelle, qui faillit s’arrêter net un jour de juin 2004.
Il y a de l’amour et de la fierté dans la voix de Renaud Gruss lorsqu’il évoque son cher Orchestre de chambre de Toulouse (OCT), « le seul orchestre de chambre permanent de France organisé sous la forme d’une Société Coopérative de Production (SCOP) ». Il faut dire que la vénérable organisation, créée en 1953, a frôlé la correctionnelle il y a 13 ans, côtoyant alors des abysses dont personne ne la voyait revenir. Tout avait pourtant bien commencé pour l’OCT, administré selon les statuts d’une association loi 1901 par un groupe de passionnés, bénévoles, au service de la musique et de ses artisans. Mais le temps sait faire des ravages : « Les dirigeants historiques ont passé la main, ils sont partis à la retraite tout simplement. Et leurs successeurs n’avaient plus cette proximité avec les musiciens. Un fossé s’est creusé, inexorablement… » Le 11 juin 2004, le couperet tombe. Après plusieurs années d’errance budgétaire et malgré les nombreux avertissements des autorités et les appels à la prudence répétés de Renaud Gruss, alors simple membre de l’orchestre, l’OCT est placé en liquidation judiciaire : « Officiellement, nous étions morts ! C’était la première fois depuis la fin de la guerre qu’un orchestre permanent disparaissait. » Sans doute parce qu’il avait prédit une telle dérive et sa seule issue possible, Renaud Gruss sait qu’il faut agir vite.
La SCOP : un pari osé
Fort de sa connaissance des rouages de l’OCT et de sa position de donneur d’alerte durant toutes ces années, il s’empresse de consulter les décideurs locaux pour réaliser son plan, mûrement réfléchi : relancer immédiatement la structure sous la forme d’une SCOP. Et ça marche : « J’avais la confiance des institutions. Nous avons pu récolter très rapidement 300 000 euros et repartir de plus belle ! » La somme est déposée sur un compte du Crédit Coopératif, qui accueille chaleureusement ce projet original et solide : les affaires reprennent ! D’abord timidement, avec 55 concerts organisés la première année, puis franchement, comme en atteste l’augmentation exponentielle des évènements saison après saison, jusqu’à une année 2018 record, avec 172 représentations. Pour Renaud Gruss, le pari est gagné : « Nous avons multiplié par deux nos activités et par quatre notre productivité. Le modèle est rentable ! Notre chiffre d’affaire oscille entre 870 000 € et 1,1 M € et nos déficits ont été comblés.» Couronné du Prix Lauréat Fondation en 2012, pour sa réussite exemplaire en tant que SCOP, l’OCT et ses 15 salariés – 12 musiciens et 3 administratifs – partagent depuis ses activités entre sa saison sur abonnement et ses contrats honorés en France et partout dans le monde. Souvent dans le cadre des politiques culturelles des collectivités, il poursuit sa mission de diffuseur de culture auprès du plus grand nombre.
Des projets pour durer
Un retour à la normale qui n’a pas éteint les ambitions de Renaud Gruss, touche à tout visionnaire et prévoyant. Non content d’avoir relancé l’OCT, il commercialise en 2012, après deux années de recherche en collaboration avec l’Institut Français du Textile et de l’Habillement, une fibre synthétique censée remplacer le crin des archets, la fibre CORUSS. Une innovation aux nombreux avantages, susceptibles de représenter une source de revenus complémentaires non négligeable pour l’OCT à moyen terme : « Ces mèches sont plus résistantes et ont une durée de vie deux fois supérieure aux matériaux naturels, pour le même prix ! Nous en vendons déjà dans le monde entier. Tous les musiciens ne sont pas adeptes, c’est normal pour ce type d’objet. Mais ils sont de plus en plus nombreux à plébisciter le produit. » Désormais précurseur sur le marché des instruments à cordes, l’OCT rayonne plus que jamais et peut envisager l’avenir sereinement. Beaucoup auraient pu en douter lors de ce funeste été de 2004, pas Renaud Gruss : « Nos clients n’ont même pas su que nous nous étions arrêtés ! Quatre mois et demi d’inactivité, c’est comme s’il ne s’était rien passé ! » C’est presque vrai !
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Crédits photos : ©Brice Devos