Créée en 1979, l’association Les Compagnons Bâtisseurs Provence œuvre à améliorer les conditions de vie des personnes mal logées. Lauréate du prix de l’utilité sociale remis dans le cadre du mois de l’ESS le 14 décembre 2020, Anne-Claire Bel, Directrice de la structure, revient sur cette récompense.
Pouvez-vous présenter l’association en quelques mots ?
Les Compagnons Bâtisseurs Provence appartient à un réseau national composé de 12 antennes régionales. L’association provençale compte 35* salariés (dont 16 femmes), 12 volontaires et une quarantaine de bénévoles. Elle intervient sur 4 des 6 départements (Bouches-du-Rhône, Var, Vaucluse et Alpes-Maritimes) de la région Provence Alpes Côte d’Azur. Notre action se fonde sur la démarche d’auto-réhabilitation accompagnée, sur la base de la participation active des occupants des logements. Nous débutons par un diagnostic technique concerté avec les habitants pour déceler leur mal-être dans le logement et trouver la solution qui leur convienne. Ensuite, lors de la mise en place du chantier, les habitants participent aux travaux. Ainsi, nous créons du lien avec eux et les rendons acteurs des travaux dans leur logement ce qui permet, pour certains, de les aider à se projeter dans d’autres champs de leur vie (travail, formation, etc).
Démarche d’auto-réhabilitation accompagnée :
les Compagnons Bâtisseurs Provence travaillent avec les habitants sur les chantiers
Le contexte Covid a-t-il eu un impact sur vos activités et vos bénéficiaires ?
Durant cette période, nos équipes, notamment marseillaises, ont été confrontées à la paupérisation des habitants, souvent liée à une perte de ressources. Nous avons continué à être au contact des habitants, pour les rassurer, les maintenir dans une dynamique de projet, pour repérer les situations de précarités alimentaire ou énergétique. Nous savons que notre accompagnement est clé, c’est ce que nous savons faire. Nous sommes sur le terrain depuis quatre décennies et il était important de maintenir le lien, malgré la situation.
Le 14 décembre dernier, votre association remportait le prix de l’utilité sociale décerné par ESS France, pourquoi aviez-vous postulé ? Et que vous a-t-il apporté ?
Les Compagnons Bâtisseurs sont souvent associés à l’aspect de l’amélioration des logements, on en oublie fréquemment la partie sociale qui est tout autant au cœur du projet de l’association. Notre image est généralement associée à des interventions dans des quartiers défavorisés où beaucoup d’immeubles sont délabrés, à la lutte contre l’indécence.
Postuler au prix de l’utilité sociale, c’était se rappeler à nous, équipes des Compagnons Bâtisseurs Provence, mais aussi rappeler à nos parties prenantes (bénéficiaires, partenaires, etc.), que notre accompagnement socio-technique est au service du mieux vivre, mais aussi du développement de la capacité à agir. Le chantier pousse à se lever le matin, se mobiliser sur un projet et crée des externalités positives diverses. Ce prix récompense notre engagement auprès d’une population en grande difficulté.
Justement, parmi les projets accompagnés, l’un d’entre eux vous a-t-il plus particulièrement marqué ?
Il y a du sens derrière chaque personne que nous suivons, chaque logement où nous intervenons. En 2019, nous avons accompagné 1617 habitants, dont 294 chantiers d’auto-réhabilitations accompagnées dans le parc locatif privé ou public, ou encore chez des propriétaires à revenus modestes.
Une intervention m’a tout de même marquée. Une femme malvoyante vivait volets fermés car ses murs blancs l’éblouissaient. Ses interactions sociales étaient très limitées puisqu’elle vivait dans le noir. En repeignant ses murs avec son aide et celle de ses proches, dans une couleur taupe plus adaptée à son handicap qu’elle avait elle-même choisie, elle a pu retrouver un confort visuel. Elle a pu ouvrir ses volets à nouveau et renouer des liens sociaux.
Et aujourd’hui, quelles sont les perspectives d’avenir pour les Compagnons Bâtisseurs Provence ?
Nous continuerons de nous développer de façon maitrisée en 2021 sur de nouveaux territoires ou au travers d’autres problématiques, sur le secteur cannois par exemple sur l’accompagnement de personnes souffrant du syndrome de Diogène (accumulation importante d’objets, incurie) ou encore l’accompagnement des copropriétés de moins de 10 lots non couvertes par les dispositifs des services publics sur certains quartiers de Marseille.
- Découvrir les Compagnons Bâtisseurs Provence en vidéo
- En savoir plus sur le syndrome de Diogène
- https://www.compagnonsbatisseurs.eu/Provence
*chiffres de 2019